Passage central

Que vers il y a 
sitôt que s'accentue la diction, 
les tierces et les sixtes, 
rythme dès que style, 
on met la pédale, 
le vers, je crois, avec respect, 
les deux, attention à ne pas 
noyer la main droite, 
et attendit que le géant 
qui l'identifiait à sa main tenace, 
cette main gauche trop puissante 
et plus ferme toujours de forgeron, 
mais il n'entend pas, 
toute la langue, 
ajustée à la métrique, 
il devine seulement, 
et ça va revenir, 
y recouvrant ses coupes vitales, 
le staccato s'évade, 
vient à manquer, 
les accords bien pleins, 
selon une libre disjonction 
aux mille éléments simples, 
le petit doigt solide, 
pour, lui, se rompre, 
pas trop de pédale, et, 
je l'indiquerai, voyons, 
ne pas tomber sur les basses, 
pas sans similitude 
avec la multiplicité 
des cris d'une orchestration…

Un lecteur français aux toilettes, 
ses habitudes interrompues 
à la mort de Victor Hugo, 
lit Mallarmé, ou plutôt 
essaie de le lire, 
ne peut que se déconcerter, 
car il y voit très mal. 
À la radio, Hugo, 
dans sa tâche mystérieuse, 
rabattit toute la prose, 
la troisième ballade de l'opus 118 de Brahms, 
philosophie, éloquence, histoire, au vers.
Par la fenêtre ouverte, et, 
comme il était le vers personnellement, 
les cigales assourdissantes, 
il confisqua chez qui pense, 
discourt ou narre, 
presque le droit à s'énoncer, 
un marteau-piqueur et les oiseaux. 
Arrivé au passage central de la Ballade, 
monument en ce désert, 
avec le silence loin, 
il en perd le fil, 
dans une crypte, 
n'arrive plus à en suivre les contours, 
la divinité ainsi d'une 
majestueuse idée inconsciente, 
les cigales ont pris le dessus, 
à savoir que la forme appelée vers, 
aidées par les oiseaux et le marteau-piqueur,
est simplement elle-même la littérature.