Midi

Pommiers du Japon, forsythias,

Et puis la tombe,

Et le vent dans les hautes herbes,

Un peu de soleil inutile

Et le silence.

Maintenant !

Tout nous est donné en même temps. L’instant ne dépasse que très peu du jeu des hasards. Pourtant, il les foudroie. Comment ? Je sais en tout cas que le monde est là, dehors, dans le cadre. La lenteur des choses et notre mémoire me permettent encore de dessiner du doigt, de caresser avec ivresse la buée du visage de Sophie. Ma main sait qu’elle respire, la terre tremble doucement, les axes tournent sans bruit dans leur nuit tiède. Les continents se parlent, puis se taisent. Puis reprennent leur conversation calme, assourdie. Afrique, Europe, Asie, les fils frémissent, la rosée bourdonne. Tout est à sa place. Sous la mer, de grands corps se taisent, rient sous cape. Le visage est nu. Il appelle. J’ouvre ma main, j’écarte les doigts, je sens l’air cerner le mouvement, je la referme, mes ongles comme des falaises de glace. Je cherche dans les couleurs, je cherche dans le blanc. Vague jaune d’un corps assoupi. J’ouvre encore ma main, j’ai confiance en elle, elle sait encore, elle a toujours su. Le regard retourné, l’espace surplombé de son rire s’inscrivent dans les contours de chaleur qui dérivent en moi. Je sais que cette force de l’unique est offerte à la blessure, que de là vient l’arrogance de sa nudité. Elle s’avance et se retire du même mouvement, elle encercle mon sang. Ma main énorme, vêtement du temps flottant, barque des opéras simultanés, en toutes langues, dans toutes les contorsions ricanantes des foules anonymes. Sa question précise et muette, sa façon de remonter d’un temps oublié, de reprendre pied, de se remettre à respirer comme si elle avait perdu ce réflexe, ou comme si on avait oublié de lui laisser cet héritage, cette petite chose toute simple qui pourrait aller de soi. Rythme d’une peur tue, non négociée, giclée d’apnée sourde. Regard écho drap ventre souffle. Son visage comme un nuage. Poussières chaudes en spirales, dentelles de vertige, paupières à l’abandon sous le lichen du désir. Un fleuve de statues coule dans son corps, le gravier roule : milliers d’yeux, portes de givres rayées de vent.


Dans l’intervalle, son tympan de foutre, c’est ma signature-nacre, la droiture de ce geste d’hostie blanche courroucée. Soie froissée de son cul ouvert, angle, ongles, courbure nette de la voix rentrée, gravier dispersé, jeté sur la peau. Elle suce son pouce, puis elle dit : « Ta salope de queue, ta petite Pute de Bite… » en faisant claquer le "P" et le "B". Le con sonne : tulipe de son cul-regard. Toi-lèvres, Moi-livre : percussion de l’ouïe : pute, bite, pluite, puit, pulite, putiluth, tit’ flûte ! Signe, mon singe ! Saigne-moi sonore ! Vas-y, homme, sonne mon Nord, frappe-le de ta lime-lame ! Vise l’art de mon tour, visse mon trou, darde dans mon vase, garde ma vase dans tes couilles, pantin dur ! « Ma bête, ta bite ! » Empile, empale mon pôle. Je te pèle ton équateur, je mêle trop tes piques, je gobe tes globes, tu m’en mille doigts mal phallus anus, et moi molle, ton or dur j’en veux en corps, en sac, en vrac, en galop sucré, en lit-cœur-tache, en baisouille liche, touche mes loches, louche sur mon bout d’Uranus rose… Tu salipes l’hop ? Tu livres, tu vrilles, ta salive bruine, tes villes brunes burinent mes urnes ? Tu débarques ? Arrose ma bouche, mon lourd lézard chaud, grimpe sur ta tige et crie : « Terre ! » Trop tard, trop tôt, tire ton dard encore, je me fous du temps rouge qui pisse, je m’allonge, je mélange, je rallonge ton ange bandé, je remonte ton radar-fuseau, je lance ton museau hagard dans la grande raie du temps. De son index, elle agace le drap (aiguille torve). Elle attrape vite fait le traversin, se jette sur lui, et dit : « Je vais me branler, tu vas regarder, et tu vas gicler sur moi. » Elle est à quatre pattes, le visage sur le côté, elle remet ses lunettes pour me voir. Sa tulipe brune dépasse des plis et commence à coulisser sur le piston mou. Elle tort ses yeux pour me fixer, pendant que j’attrape ma queue, fort, à deux mains. Elle coule dans son lit, la petite statue salope, elle me dit : « Crache, crache ! accrache, décroche, vide ta cruche en croches, tu vas écouter ma vague de fugues, tu vas compter mes mille coups de con ! » Elle y va de son ricercare, de sa chaconne baveuse et furax, elle fruite ses soupirs, elle tord ses clefs, les fait fondre dans sa niche de lait brûlé, elle lèche sa paume, de son autre main soupèse mes couilles, et dit : « Maintenant ! »

Désordre à l'ourlet

Désordre à l’ourlet, disent-ils de ces femmes sans ombre ! Ce revers rond, cette mouillette tonale, tonique capiteuse, ce bel amas de foutaise renversée… Un jour viendra où les gouffres n’auront plus de bords ; en de longs plis sévères, les nez se coifferont de ce délit d’eau sale et langue torve.

Nuit gazeuse

Bruits de femmes ; fruits de blâme.

Nuit gazeuse de leurs jambes flottantes.

Après Mâcon

Après Mâcon, un fleuve,

et dans l’or bleuté du soir qui vient,

des enseignes vert-pomme et bleues

qui dépassent les lanières vert-ocre

des arbres en bande.